Vivre avec un handicapVivre en société

J’ai testé pour vous… une journée les yeux fermés !

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J’accorde beaucoup d’importance à ce que je vois et je prends le temps d’observer ce qui m’entoure. J’aime regarder, contempler, admirer. La vue est d’ailleurs le sens le plus sollicité. Elle permet de se repérer dans l’espace, de lire, d’écrire, et de se connecter à la réalité. Elle joue aussi un rôle important dans la mémoire. Et, je me suis toujours demandé comment je réagirais si on me privait de la vue. Je me suis alors lancé le défi de passer une journée les yeux fermés !

Trouver quelqu’un de confiance

Pour profiter pleinement de cette expérience, je me suis établi un programme assez proche de mon quotidien : du temps chez moi, pour m’acclimater ; une balade avec des déplacements à pieds et dans les transports en commun ; faire les boutiques ; boire un café entre ami(e)s ; faire quelques courses et regarder un film. Un programme ambitieux ! Alors, j’ai demandé à un ami de m’accompagner en me promettant de ne pas me faire trop de blagues et… il a accepté. 

J’ai placé des caches-œil devant chacun de mes yeux, ajouté une paire de lunettes de soleil pour ne pas laisser entrer la lumière, et voilà. J’ai perdu, temporairement, la vue.

S’adapter… Des nouveaux repères

Les premières sensations ont été perturbantes. Plus de repères dans l’espace et dans le temps. Alors j’ai tâtonné, avec les pieds et les mains, j’ai avancé doucement, sans prendre de risque, le temps de m’y faire.

J’ai la chance de connaitre mon appartement par cœur, de pouvoir me le représenter mentalement. Alors, très vite, les habitudes prennent le dessus sur la désorientation et mes craintes. Je suis passée facilement du lit à la douche, je sais où est posée ma brosse à dent et suis parvenue à la saisir sans soucis, et j’ai même réussi à me faire mon café. Jusque-là tout va bien. Mais après ?

Je me rends compte que je ne peux pas utiliser mon téléphone comme d’habitude. Quand bien même je réussirais à le déverrouiller, je ne peux rien regarder. Oublions le téléphone. Un livre ? Compliqué. Dessiner ? Non plus. Coudre ? Impossible. Écouter ? Oui, écouter. J’ai choisi de mettre un podcast. Je me suis installée, mon ami a choisi pour moi et je n’avais qu’à écouter attentivement.

Après ce moment chez moi, j’ai eu envie de sortir mais une fois sortie, les premiers pas n’ont pas été évidents. En temps normal, on voit les choses au loin et notre cerveau se prépare. Mais là, impossible d’anticiper une marche, de prévoir un obstacle, un feu rouge… Puis, j’ai très vite eu confiance en mon ami qui me guidait par le bras et par la voix. L’après- midi était lancée. Etonnamment, j’ai réussi à me repérer dans le temps et dans l’espace !

Des réussites et des loupés

Ce que j’ai trouvé le plus sympa, c’est d’acheter des vêtements sans les voir. En rentrant dans une boutique, je m’attendais à susciter l’interrogation voire la gêne du personnel. Finalement, le personnel a été attentionné, à l’écoute et bienveillant et ils m’ont attribué la cabine d’essayage pour handicapé.

J’ai apprécié acheter sans faire attention à mon image. Habituellement, je peux mettre des heures à choisir un vêtement et à m’observer dans le moindre détail pour être certaine de l’acheter : « Est-ce qu’il me va vraiment ? » « Cette couleur n’est pas un peu bizarre ? » « Est-ce que les autres vont l’aimer ? », etc. J’ai dû faire confiance à mon ami concernant la description des vêtements, me fier au toucher des tissus et, en fait, me demander si j’étais à l’aise dans la tenue, tout simplement. Je dois avouer que c’était plus facile que ce que je pensais !

Prendre un café avec des amis, je savais que je pouvais le faire sans aucun soucis. En plus, mes amis ont joué le jeu. Peut-être un peu trop puisqu’ils ont oublié de prêter attention à mon « handicap ». Je me suis rendu compte encore une fois de l’importance de la vue. En temps normal, lorsqu’une personne se lève de table, je suis capable de le remarquer et je comprends que je ne dois plus lui parler. Mais pendant que mon ami était discrètement parti régler son café, j’ai continué de lui parler pendant 5 bonnes minutes. Enfin, à sa chaise… Ça m’a mise un peu mal à l’aise, mais ça a eu le mérite de faire rire les autres !

Des souvenirs plein la tête !

Quand on ne voit pas, on entend tout ! On s’accroche à tout ce que l’autre peut dire et décrire. J’ai découvert des sensations comme mon corps en mouvement les yeux fermés. J’ai profité des odeurs, surtout lors de mes repas. J’ai pris le temps de sentir ce que j’ai mangé, ce que je ne fais jamais, comme si la vue remplaçait l’odorat… J’ai écouté plus intensément les voitures, les voix, les respirations, les bruits en général. J’ai pris le temps de toucher les matières, les objets, les personnes.

Je me souviens aussi de beaucoup de mes pensées ce jour-là. Finalement, je garde plus de souvenirs de cette journée exceptionnelle que de mes journées du quotidien.

Cette expérience m’a permis de vivre peut-être quelques sensations que peuvent ressentir les non-voyants, même si je ne peux pas me rendre compte de leur réalité en une journée. Et toi, tu as déjà pensé à tester une expérience comme celle-là ?

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