Je maltraite quelqu’un
Le mot maltraitance est très souvent lié à celui d'enfant ou d'enfance. Pourtant, loin de l'image médiatique du petit face à l'adulte, les statistiques sont là pour nous rappeler que les ados sont eux-aussi des victimes potentielles de la maltraitance et que le danger peut se trouver sur leur lieu de vie.
Les derniers chiffres publiés ( Rapport 2002 de l'Odas) montre qu'en 2002 il y a eu 86 000 signalements d'enfants en danger. Il est vrai que les statistiques ne sont pas le reflet exact de la réalité. En effet, seul les cas de maltraitance « révélée » peuvent être pris en compte. De plus, ils ne traitent que la tranche d'âge au moment où a eu lieu la mise au grand jour de ce que la victime a subi.
Voici quelques statistiques sur l'âge des personnes pour lesquelles a été signalée une maltraitance quelle qu'elle soit. ( Source, Odas et Le Monde du 10/02/99).
- 21% des cas concernent les enfants de 0 à 5 ans.
- 28% des cas, les 6-11 ans
- 48% des cas concernent les adolescents de 12 à 17 ans. Certes, plus on avance en âge, plus on a de possibilités d'exprimer sa souffrance de manière claire ; pourtant ce chiffre est très important (trop !).
- 3% des cas concernent les plus de 18ans, adultes compris.
Les auteurs de ces mauvais traitements se trouvent le plus souvent dans l'entourage proche du jeune.
- Dans plus de 85% des cas, ils font partie de la famille proche (père, mère, beau-père, belle-mère, frère/soeur). C'est à dire que la victime vit au jour le jour avec son agresseur et qu'au-delà de la maltraitance, des liens d'affection et d'autorité les unissent.
- Dans 10 % des cas, l'agresseur est un membre de l'entourage plus ou moins proche (voisin, amis des parents, camarades). La victime, même si elle ne vit pas avec lui peut être amenée à le voir quotidiennement ou alors à pouvoir le croiser sans le vouloir, y compris sous son propre toit.
- Dans moins de 3% des cas, l'auteur des mauvais traitements est un professionnel en position d'autorité sur le jeune ( professeurs, médecins, magistrats, éducateurs ).
La maltraitance des adolescents est donc un véritable problème en France que l'on ne peut ignorer même s'il ne concerne pas directement la plus grande majorité. Pourtant, il est important de rester vigilant et de ne pas oublier que les enfants ne sont pas les seuls concernés. De plus, même si les mauvais traitements ont eu lieu durant l'enfance, certains ados continuent de souffrir d'une situation passée. Dire les choses est un premier pas vers une vie qu'il leur faut construire.
« Depuis quelques temps je traite ma mère et j’ai du mal à ne pas le faire », « Mon petit frère parle de maltraitance quand je m’amuse à le frapper », « Ma sœur dit que quand je l’empêche de sortir c’est de la maltraitance. Je ne comprends pas pourquoi ».
Il n’est pas évident de reconnaître que l’on maltraite quelqu’un. Quand on est confronté à des situations qui nous contrarient on peut avoir a du mal à contenir sa propre violence. Si on a conscience que quelque chose cloche on peut se demander pourquoi on réagit comme ça et comment faire pour changer la situation…
« C’est pour leur bien »
Parfois on peut trouver ses parents ringards, nuls, démodés, ils nous énervent et on a envie de les bousculer, les insulter, les frapper. On peut même en arriver à se dire « je vais le buter »… surtout ils nous interdisent de faire ce qu’on a envie. Il n’est alors pas évident de rester calme… C’est pareil avec les frères et sœurs, il arrive qu’on croie les endurcir ou les protéger des violences de la vie en leur faisant subir à l’avance les dangers qui les attendent dehors…
Mais l’expérience de la violence n’est jamais enrichissante, elle laisse des traces. Elle nourrit la peur ou l’hypocrisie et ne permet pas de construire des stratégies pour se protéger soi-même ou comprendre l’autre.
D’où nous vient parfois cette envie de maltraiter l’autre ?
Quand on ne comprend pas une situation, une personne, quand on a peur, ou quand on n’arrive pas à obtenir quelque chose, alors on dit que l’on est « frustré ». La frustration c’est quand on veut quelque chose et qu’on ne peut pas être satisfait immédiatement. Par exemple tes parents t’interdisent de jouer à la Play-station et bien l’émotion que tu ressens est de la frustration.
Cette émotion très désagréable on va avoir naturellement envie de la transformer en une autre émotion afin de ne pas se sentir trop impuissant… On va essayer de réagir ! La colère est souvent cousine de la frustration : en fait c’est une manière de reprendre le pouvoir !
Et quand on expérimente le pouvoir sur l’autre on peut en abuser. Cela peut en effet être fascinant de voir que l’on peut faire peur, obliger l’autre à réagir comme on le souhaite. Surtout quand soi-même on a l’impression parfois d’avoir été maltraité, ou impuissant face aux autres. Certains le font par la violence physique ou verbale et d’autres manipulent les sentiments ou le groupe familial pour obtenir satisfaction… rien de tel que de faire encore une fois culpabiliser ses parents en leur faisant du chantage au suicide s’ils ne t’accordent pas ce que tu demandes. C’est une forme de maltraitance perverse qui laisse des traces dans la relation à l’autre.
« Si j’ai maltraité quelqu’un une fois, je risque de recommencer ? »
Malheureusement, faire l’expérience de maltraiter quelqu’un peut être satisfaisante car elle donne l’illusion que l’on a réussi à surmonter sa colère, son manque, ou les limites que les parents avaient essayé de poser. Mais la fin ne justifie pas les moyens. Pour cela on a intimidé, fait peur, manipulé, humilié, ou violenté l’autre ! Et c’est inacceptable.
On n’a pas le droit de blesser ou d’écraser l’autre pour obtenir ce que l’on souhaite. Le chemin est parfois plus long mais beaucoup plus satisfaisant si on le parcourt ensemble.
Mais ce n’est pas parce qu’on a blessé une fois quelqu’un que l’on est forcément devenu un tortionnaire. Souvent les parents, les proches, nous le disent : « t’es allé trop loin », « tu es violent », « tu n’as pas le droit de prendre toutes les décisions pour moi »… Entendre ce qu’ils nous disent c’est commencer à comprendre qu’on a dérapé.
On peut avoir l’impression d’être enfermé dans ce système où pour obtenir ce que l’on souhaite on passe en force. Et parfois on a du mal même à réagir autrement. En colère contre la terre entière, on s’acharne pour éviter de s’effondrer…
Si tu as l’impression que tu as besoin de montrer en permanence aux autres que tu es fort, puissant, que tu n’as jamais de moments de faiblesse, c’est peut être que tu n’as pas les mots pour exprimer tes choix et qu’il t’est difficile d’affronter les autres (sans les détruire). Ne reste alors pas seul avec cette sensation !! Appelle-nous au 0800 235 236 !
Connais-tu le proverbe de Spiderman 😉 : « un grand pouvoir, implique de grandes responsabilités » ? Cela signifie qu’en grandissant, oui, tu acquières un peu plus de pouvoir sur les autres. Mais ce pouvoir, c’est à toi de bien l’utiliser pour être heureux avec ceux avec qui tu vis !